Sujet : Quelle est l'entrée en scène de Phèdre que vous trouvez la plus pertinente ? Pourquoi ? Justifiez vos idées.
Le mythe de Phèdre a suscité de nombreuses versions, parmi lesquelles celles de Racine, Euripide et Sénèque. Phèdre entre en scène différemment suivant les versions ; ces entrées en scènes sont plus ou moins pertinentes.
Tout d'abord, la version de Racine, la plus récente (1677) dépeint une Phèdre fatiguée et faible, n'ayant plus de force, déprimée et ayant des envies suicidaires. Elle est également paranoïaque : "Tout m'afflige, et me nuit, et conspire à me nuire". Dans cette version, le rôle de la nourrice est de la rassurer, et de faire en sorte qu'elle ne se suicide pas : "Quoi ! vous ne perdrez point cette cruelle envie ? Vous verrai-je toujours, renonçant à la vie[...]?" dit-elle après que Phèdre ait déclaré avoir envie de se suicider. En résumé, cette version dépeint Phèdre étant déprimée, fatiguée et suicidaire, et la nourrice (ici, Oenone) aidant Phèdre à oublier ses malheurs.
Ensuite, la version d'Euripide, la plus ancienne (428 av.J-C) met en scène Phèdre comme étant fatiguée physiquement, et ayant envie d'oublier ses malheurs : elle demande à ses esclaves de la supporter, ses membres sont "près de se dissoudre", elle se lamente qu'elle ne puisse pas se "reposer sur une verte prairie". Ici, le rôle de la nourrice est également d'aider Phèdre à oublier ses malheurs, mais aussi de surveiller ses paroles : "Ne va pas parler ainsi devant la foule", car il ne faut pas oublier qu'elle est la reine d'Athènes. Cette version met donc en scène Phèdre, fatiguée et ayant envie d'oublier ses malheures, et la nourrice voulant l'aider mais aussi ne voulant pas que les Athéniens soient au courant de ses malheurs.
Enfin, la version de Sénèque, datant du Ier siècle, nous montre Phèdre comme étant un peu fatiguée physiquement (le texte ne fait que peu de références à son état physique), et comme ayant conscience de ses malheurs. Son âme s'égare, elle "reconnaît la funeste passion qui égara sa mère infortunée". Ce qui est exclusif à ce texte par rapport aux deux autres est qu'elle reconnaît que son malheur ne vient pas d'elle, mais de sa mère qui "n'a pas rougi d'aimer le chef indompté d'un troupeau sauvage", ce qui lui a valu la malédiction du Ciel. Comme dans les deux textes précédents, le rôle de la nourrice est d'aider Phèdre à oublier définitivement ses malheurs, et d'empêcher qu'elle se suicide (bien que Phèdre n'y ait pas fait allusion) : "Hâtez-vous d'effacer de votre chaste coeur ces pensées abominables [...] et ne vous laissez pas aller à une espérance funeste".
En conclusion, l'oeuvre la plus pertinente serait la version de Racine. En effet, contrairement aux deux autres oeuvres, elle est la seule à dépeindre Phèdre comme étant suicidaire, déprimée et paranoïaque, ce qui pourrait paraître normal si l'on était maudit par les dieux. La version de Sénèque aurait pu être l'oeuvre la plus pertinente, mais elle dépeint Phèdre comme étant perdue, à peine déprimée, elle semble seulement avoir des problèmes mineurs. Quant à la version d'Euripide, le texte est très court et il est donc difficile de le comparer aux autres, mais Phèdre paraît juste ne plus avoir de forces et avoir envie de se reposer, même si cela ne règlera pas le problème ; selon moi, c'est donc la moins pertinente des trois oeuvres.
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